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TMS : des représentations à la réalité

Dans cette chaîne d'une dizaine de pressings les repasseuses sont les principales salariées concernées par des TMS aux mains et aux poignets. L'analyse montre que les troubles touchent tous les salariés en magasin et plutôt les articulations de l'épaule. Elle met en évidence la plus grande fragilité des salariés à développer des stratégies de défense.

Effectif : 100 salariés
Activité : Pressing

Ce groupe de pressings compte une dizaine de magasins pour un effectif d'environ 100 personnes. Bien que l'activité reste artisanale, elle est organisée dans une logique de flux tendu. Il s'agit de traiter rapidement les pièces déposées tandis que la capacité de stockage est limitée. Ainsi, le développement du groupe a été permis par la standardisation de l'activité garantissant des prix concurrentiels. Cependant, si la rapidité du service rendu était fortement mise en avant par le passé, c'est le critère de la qualité qui prime aujourd'hui.

La demande de l'entreprise

La direction et la secrétaire du CHSCT interpellent l'ARACT au sujet de troubles musculosquelettiques. Les repasseuses en magasin, souffrant aux mains et aux poignets, seraient les principales concernées. Ce sujet est régulièrement soulevé dans le cadre des réunions de CHSCT avec le médecin du travail et le contrôleur de la CRAM sans aboutir à la construction d'un projet de prévention particulier. Les efforts ont jusqu'à présent plutôt porté sur le risque chimique.

La démarche

L'instruction du sujet débute par le traitement des données - notamment médicales - et la qualification des conditions de travail.
Avec l'ensemble des acteurs du CHSCT, trois magasins sont retenus en fonction de leur implantation en ville ou dans un centre commercial et de la composition des équipes.

L'analyse des données médicales révèle que certaines perceptions, désignant a priori une population de travail et un type de pathologie, étaient erronées. Ainsi, les T.M.S. se manifestent en majorité par des lésions à l'épaule tandis que les articulations de la main n'apparaissent qu'au second rang. Les troubles concernent l'ensemble du personnel en magasin et toutes les catégories d'âge et d'ancienneté.

L'attention portée sur l'activité en magasin met en évidence diverses stratégies développées par le personnel. Elles visent l'atteinte d'une fluidité de traitement des pièces, condition essentielle pour tenir les objectifs tout en préservant son capital "santé". Une telle performance est tributaire d'un véritable savoir-faire collectif.
Ce fonctionnement est plus ou moins favorisé par la possibilité de développer des relations avec la clientèle (de passage ou de proximité). Malgré une organisation standardisée, la connaissance des clients permet de relativiser l'urgence du retour et de lisser le volume en cours de journée.
La fluidité se joue aussi au sein du personnel du magasin. Par exemple, les repasseuses usent d'un code (ticket retourné) permettant d'identifier rapidement les lots terminés, ce qui facilite l'intervention de la responsable pour l'emballage et le stockage. Les repasseuses surveillent également le comptoir, préviennent ou gèrent la relation avec la clientèle si la responsable est occupée à approvisionner ou à décharger les machines.
De telles régulations ne sont mobilisables que si la solidité du collectif (équipe stabilisée et effectif complet ) et la configuration spatiale du magasin le permettent.

A contrario, il s'agit d'être vigilant aux situations dégradées et à leur fréquence. Retard accumulé ou absence de collègue peuvent se traduire par une intensification du travail où chacun puise sur ses ressources. L'enjeu est de limiter cette exposition et d'offrir aux personnes sollicitées de récupérer dans de bonnes conditions.

Ainsi l'intervention reprend l'ensemble des facteurs favorables ou défavorables à la survenue de T.M.S. à partir de la dynamique de fonctionnement en magasin. Ce point de vue élargit la logique d'action menée et incite l'entreprise à dépasser la recherche ponctuelle d'améliorations techniques au profit d'un projet plus articulé, considérant à la fois l'environnement de travail et la gestion des ressources humaines et des relations sociales.

Bilan

Le traitement des données a permis d'enrichir avec les acteurs de l'entreprise certains liens entre l'apparition de douleurs et des évènements de l'entreprise (changements organisationnels ou négociations). De plus, cette formalisation a posé les bases d'un tableau de bord utile pour le suivi de l'évolution des cas de T.M.S. dans l'entreprise.

La compréhension du travail est à la base d'un projet qui se décline en quelques axes :

définir les priorités d'aménagement ou de renouvellement du matériel
recenser les solutions donnant satisfaction
penser l'aménagement de l'espace afin de favoriser le fonctionnement collectif en magasin
gérer les effectifs et le suivi du temps de travail afin de limiter l'exposition du personnel et organiser une récupération suffisante
construire des relations sociales permettant de gérer les cas déclarés selon leur stade : favoriser une détection précoce, permettre la récupération avant qu'une atteinte soit irréversible
anticiper les conditions de reprise du travail...

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